Bourgoin
- par gabriel
- dans Biographies
- sur 14 octobre 2021
Naissance
Ma mère et moi assis dans mon landau.
Ma mère avec une petite fille inconnue,
Peut-être ma grand-mère, me tenant sur ses genoux.
Mon père.
Je choisis la nuit pour rentrer dans le monde. Les ténèbres m’attiraient mais je voulais en même temps leur échappé. Ainsi j’allais progressivement vers la lumière. La rupture était moins brutale. Je me retrouvais dénudé, sans cette enveloppe chaude qui m’avait protégé durant de longs mois et dans laquelle j’avais grandi et profité. Je ne me souvenais plus du moment où j’y était entré. Ma conscience ne remontait pas jusques là. Mon arrivée au milieu des vivants m’arracha un cri. La joie de la découverte ? La tristesse du renoncement ? Les deux certainement. Je me sentis happé par un monde qui m’attirait et que j’allais passionnément découvrir chaque jour. Je ressentis de nouvelles sensations qui s’imposaient à moi d’un seul coup. Une fraîcheur sèche caressait ma peau nue, une diffuse clarté jaunâtre apparaissait sous mes paupières fermées, des sons plus nets, moins assourdis affleuraient mes tympans. Un fluide moins épais circulait dans mon nez. Quels sentiments m’animaient-ils ? La peur ou la confiance ? La tristesse ou la joie ? Je ne savais pas trop, tout était confus.
Je me sentis tout à coup blotti contre une douce masse chaude qui lentement me berçait. Puis je m’enfonçais dans un liquide identique à celui d’où j’étais sorti. Quelque chose de doux parcourait agréablement l’ensemble de mon corps. Je découvrais des clapotis, des voix graves et aigues. De nouvelles senteurs traversaient mes narines. Je distinguais mal toutes ces sensations mélangées formant une sorte de magma.
Fatigué par toutes ces découvertes , je m’endormis paisible, calme et serein.
De brefs réveils puis de longs sommeils se succédèrent ainsi.
Parfois j’avais une sensation de creux, quelque chose d’indicible me manquait. Je criais, je pleurais. Alors je sentais une masse molle s’introduire dans ma bouche. Un liquide chaud et suave s’y écoulait. Je l’accompagnais machinalement par un mouvement des lèvres. Je tétais. Une sensation agréable ressemblant à un long chatouillement se développait tout autour sur mes babines, sur ma langue, dans mon gosier. Puis le creux étant comblé et je m’endormais repu.
Tels furent mes premières journées.
On me raconta plus tard que j’étais né le Dimanche 20 Mai 1945 à 1h du matin à la maternité “des petites soeurs ” 100 rue de la Libération à Jallieu à côté de Bourgoin en Isère. J’y fus baptisé le mercredi 23 Mai sous les prénoms de Gabriel (celui de mon Grand-Père paternel), Louis (celui de ma Grand-Mère maternelle) et François (celui de mon Grand-père maternel). Ma marraine, ma Grand-mère maternelle et mon parrain, André, le frère de ma mère devaient certainement être présents. Plus tard, on me dira que ma grand mère était venue me voir à Jallieu et était restée assez longtemps, jusqu’à manquer la naissance de ma cousine Marie-Claude, le 13 Juin à Amplepuis dans le Rhône. Son fils, le père de Marie-Claude lui reprochera cette indélicatesse à son égard.
Parents
Après que la bête immonde fut laborieusement chassée de notre pays en ruine, mon père et ma mère pouvaient enfin se retrouver. Mais le travail manquait. Mon père réussit à se faire embaucher pour divers petits boulots . En 1945, ils s’installèrent à Bourgoin. Sans logements, ils furent accueillis chez l’ancien ouvrier de son père, marié à une de ses cousines. C’était au 7 rue de la République, une pâtisserie au centre de la ville. Mon père y travailla, ma mère était enceinte. Je suis né pendant leur séjour. Puis ils louèrent un appartement route de Lyon, c’était une maison individuelle dans laquelle habitaient plusieurs ménages.
Je ne sais pourquoi, mon père changea de métier et travailla en 1947 aux « silo » de Bourgoin. Cette entreprise manquait de main d’œuvre pour y entreposer le blé.
Puis en 1948 il retrouva son métier dans une boulangerie pâtisserie de la ville.
On partit de Bourgoin en 1949 ou en 1950 ; Toujours est-il que mon père se retrouva sans travail.
On déménagea, pour s’installer à Amplepuis, où ma mère avait hérité, avec son frère André de l’épicerie de ses parents.
Inondations
Un petit ruisseau, le Bion dont le cours passait à proximité de notre maison déborda en septembre 1946. Un mètre d’eau recouvrit soudainement notre rez-de-chaussée. Mon père eut juste le temps de récupérer mon moïse pour le monter en lieu sûr au premier étage. Cette crue accompagnée de celle de la Bourbre dans laquelle se jetait le Bion fit de nombreux dégâts, dont 3 morts.
Souvenirs
Notre maison, route de Lyon
Il ne me reste que deux souvenirs de la période où nous avons habité à Bourgoin, dans une maison partagée par plusieurs locataires. Je me revois debout près de l’entrée qui donnait sur une cour fermée par un portail en fer, encadré par deux murets. Il me semble que l’un d’eux était surmonté d’une tête de lion sculptée dans une pierre grise et sale. Deux garçons, nos voisins, dont je ne saurais préciser l’âge, mais qui pour moi étaient grands, s’asseyaient sur le muret près du lion et rugissaient pour me faire peur. Il me semble que ma mère ou mon père m’accompagnait et se prenait au jeu. Pour me rassurer, apeuré, je me cachais derrière eux en riant aux éclats.
Selon ma mère, j’ai commencé à marcher à 9 mois. Autour de ma deuxième année, il m’arrivait de vadrouiller seul et d’aller voir notre voisine, la mère Paulo. Elle possédait un poêle à charbon ou à bois. Elle entreposait ses combustibles dans un bûcher dans lequel elle entassait aussi de vieux journaux pour allumer son feu. Un jour, elle enroula un morceau de page de journal quelle me mit à la bouche et qu’elle enflamma avec une allumette. Bien sûr elle l’éteignit immédiatement pour ne pas me bruler. Mais j’étais content d’avoir fumé ma première cigarette. J’avais environ deux ans. Ma mère fut indignée lorsque j’essayait tant bien que mal de lui raconter cela avec mes petits mots.
Convulsions
Les convulsions peuvent être provoquées par différentes causes : épilepsie, atteinte au cerveau (manque d’oxygène), hypoglycémie sévère (manque de sucre), hypokaliémie (manque de potassium), traumatisme cérébral (chute), accident vasculaire cérébral, méningite, …
En général, les enfants qui ont des vers intestinaux n’ont pas de symptômes. Certains enfants ont de fortes démangeaisons autour de l’anus et du vagin, surtout la nuit. Si l’infection est importante, il se peut que votre enfant ait de la difficulté à dormir et devienne irritable.
Mon père raconta à plusieurs reprises que, bébé ou très jeune enfant j’eus un malaise. Je me retrouvais dans les bras de mon père complètement raide. Il croyait que j’étais mort. Mes parents ont eu très peur. Ils ont appelé un médecin qui parla de convulsions. Il donna un vermifuge comme médecine. A la suite de la prise de ce médicament, j’avais paraît-il les selles pleines de petits vers.
Je n’ai plus eu ensuite de malaise de ce genre.
Habitudes
A l’époque, on langeait les bébés. Un carré de tissus plié en triangle scindait la taille et le bas ventre. Cela servait de couche que les mères lavaient à l’eau et au savon. Ensuite on entourait le ventre d’une bande Velpeau pour éviter les hernies. Puis avec un molleton en coton, on immobilisait les membres. Ainsi l’enfant ne pouvait pas se tourner dans le lit et il restait tel qu’on l’avait installé.